Samantha

SAMANTHA


Notre entretien avec Samantha, une jeune artiste de 16 ans passionnée par le chant et la musique. Samantha a appris à jouer du piano, seule chez elle, grâce à son « oreille absolue ». Elle se produit régulièrement dans les EPHAD et les établissements spécialisés. Son engagement pour les autres lui a d’ailleurs valu d’être récompensé et soutenu par le Conseil Départemental de la Moselle par le biais du dispositif Team Moselle Jeunesse.

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Est ce que tu peux te présenter ?


Je m'appelle Samantha, j'ai 16 ans, je suis autiste asperger, j'ai l'oreille absolue et je fais du piano depuis très longtemps. Je suis autodidacte et donc ça veut dire en fait que j'ai appris vraiment toute seule à la maison. Je joue sans partition et sans avoir pris de cours de musique.


Tu es capable d’associer les bruits du quotidien à des notes de musique ?


Tout dépend en fait des sons parce qu’en fait, c’est particulièrement dans la musique mais ça peut être aussi une casserole ou quelque chose comme ça. Surtout les cuillères et les verres parce que ça fait penser à des notes. Il y a même des gens qui jouent de la musique des cuillères ou avec des verres. J'ai déjà vu plusieurs vidéos sur youtube et je trouve ça incroyable. Pour l’anecdote, hier encore, j’étais au lycée et puis je suis allée faire du piano et il y a une surveillante qui m'a demandé plusieurs musiques parce qu'elle n'arrivait pas à le croire et du coup j'ai pu tous les refaire du premier. J’étais contente.


Qu'est-ce qui t'a donné envie d'aller vers la musique? 


Je vais t'avouer, je ne m'en souviens plus. A deux ans, mes parents m'ont acheté un piano et apparemment j'aurais commencé à jouer au clair de la lune comme ça avec un doigt. Et après j'ai commencé à faire un petit peu avec quelques doigts, puis ensuite avec deux mains. Puis ça a évolué au fil des années. Et depuis pas longtemps maintenant, je fais de la guitare, de la batterie et du ukulélé.


Tu a baigné dans un environnement musicale ?


La grande tradition dans notre famille, c'est de mettre de la musique à chaque fête. Donc évidemment j'ai été vraiment dans la musique. C'est pas comme dans le film Disney, là, Coco, où il y a le petit garçon qui fait de la guitare et puis la famille n'aime pas la musique. Moi c'est tout l'inverse. Mes parents ont joué un rôle important dans l’amour de la musique. Sans eux je ne serais pas là, je n'en serais pas à parler devant toi et à faire cette discussion on va dire. Je les remercie vraiment pour ça et puis ils m'ont encouragée surtout à continuer la musique, à continuer le chant et la guitare. j'ai aussi une salle de musique rien que pour moi et je remercie mes parents pour ça parce que le fait d’avoir une passion comme la musique c'est coûteux parce que les instruments sont très chers et puis il faut aussi l'espace pour pouvoir s’exprimer.

 "Chacun est différent, chacun a son art en soi, chacun a son pouvoir, chacun a son handicap. Et moi je trouve qu'on devrait tout montrer sans forcément avoir peur du jugement des autres. "

Est-ce qu'il y a des artistes qui t'ont inspiré, influencé? 


Oui, il y a Freddy Mercury tout d'abord parce que c'est vraiment mon chanteur préféré avec son groupe Queen. Le guitariste du groupe (Brian MAY) joue trop trop bien. Vraiment, je rêve un jour d'avoir son niveau à la guitare. Freddy Mercury c'est vraiment un artiste qui m’inspire. Je pense à sa musique « Bohemian Rhapsody » qui est très aboutie. C'est une musique qui dure six minutes, mais c'est six minutes de bonheur, six minutes d'histoire avec trois styles différents. C'est quelqu'un que j'admirais déjà beaucoup avant la sortie de son biopic en 2018, mais là encore plus. Mon admiration pour lui grandit de jour en jour. J’apprécie particulièrement sa toute dernière chanson « The Show Must Go On ». Le show continuera toujours et ça c'est une très très belle fin.


Tu écoutes quoi en ce moment ?


Alors ma musique du moment c'est « Mauvais Rêve » de Hoshi. Alors, cette musique est vraiment incroyable. Il y a des choses dans lesquelles je me reconnais comme par exemple quand elle dit « on m'a frappé la tête contre la neige devant tout le collège ». Là je me reconnais un petit peu parce que c'est vrai que j'ai vécu de l'harcèlement, je sais un peu ce que c’est. Elle fait preuve d’un grand courage et notamment dans son combat contre la surdité.


Tu as été victime d'harcèlement à l’école. Est-ce qu’aujourd’hui, en étant plus grande tu trouves que les gens font preuve de plus de bienveillance quand tu expliques ton autisme ?


Oh pas forcément, malheureusement. J’aurais aimé te répondre oui mais malheureusement il y a encore beaucoup de stéréotypes. Il y a beaucoup de gens qui confondent la trisomie avec l'autisme par exemple. Beaucoup aussi pensent qu'être autiste, c’est être bête. Et malheureusement c'est des stéréotypes qu’on retrouve beaucoup aussi dans les films et les séries. On a tous des points forts et des points faibles. En fait, on a tous notre propre handicap. Mais c'est vrai qu'à l'école, on veut qu’absolument tout le monde soit bon dans toutes les matières. C’est une manière de mettre les élèves dans des cases avec des notes. Si tu as une mauvaise note tu es forcément nul. Malheureusement parfois même certains professeurs rabaissent les élèves qui ont des difficultés alors que ce n’est pas de leur faute.


Tu te produis régulièrement dans les EPHAD et les établissements spécialisés ?


J'aime ça, j'aime me produire sur scène, pas pour qu'on me voie mais surtout pour qu'on voie le plaisir que je veux donner aux gens. Et c'est pour ça que je me produis très très souvent en Ehpad, pour apporter du plaisir aux personnes âgées. Heureusement d'ailleurs qu’ils reçoivent la visite de leur familles, mais malheureusement pas des artistes. Ça me fait toujours du bien de faire plaisir et c'est ce que je dis toujours d'ailleurs à toutes les personnes que je croise. J'ai deux passions dans la vie, la musique et faire plaisir. Et ça c'est ce que j'aime par dessus tout, que ce soit dans ma vie ou en concert parce que en fait je me mets sur ce piano et j'ai la sensation d'être dans les nuages et d'emporter tout le monde avec moi et dans ce beau monde qu'est la musique. 



Comment expliques-tu ton autisme à celles et ceux qui te questionnent ?


Quand j'explique que je suis autiste asperger, je dis que je suis différente sur certains points, mais que ça ne veut pas dire que je ne comprends pas la personne, ça ne veut pas dire que je n'ai pas de point de vue, que je n'ai pas d'imagination et que je ne sais qu'imiter. Parce que malheureusement, c'est ce qu'on pense souvent de l'autiste, c'est qu'il imite et qu'il ne sait pas se détacher de la personne neurotypique (une personne ayant un fonctionnement neurologique considéré dans la norme) pour faire son propre chemin. Et moi, je fais mon propre chemin grâce à la musique et grâce aussi à tous les gens qui m'ont aidé, je pense notamment à mes parents, à mes AESH (accompagnants d'élèves en situation de handicap), mes professeurs, mes maîtresses et aussi, évidemment à des personnes comme Loïc Villan du Conseil Départemental qui m’ont soutenu dans mes projets. Chacun est différent, chacun a son art en soi, chacun a son pouvoir, chacun a son handicap. Et moi je trouve qu'on devrait tout montrer sans forcément avoir peur du jugement des autres. 

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